Bulletin municipal n° 41 – juillet 2004
Recherches effectuées par Jean Bourillon dans les archives communales (Registres des délibérations en mairie de Châtenoy, documents déposés aux Archives Départementales et classés 3G1, 111, 118), bulletin municipal de Sury n° 4
Du 21 germinal, an II (10 avril 1794), le citoyen Antoine Deberne, laboureur à la Chalouzie, s’est permis de défricher des terres vaines et vagues des tréfonds nationaux au climat de Cossenet ou port de la Verrerie, environ 5 arpents, et il a ainsi interrompu trois chemins, celui de pont de la Verrerie à Bouzy, ceux de la forêt au port. On ne peut plus « y passer charrette ». Deberne est condamné à rétablir deux chemins, sinon cela sera fait à ses frais, et il paiera 15 livres d’amende. Cette décision fait suite à la visite du Comité de surveillance du 12 ventôse précédent.
A la même date, on étudie le cas semblable de Joseph Ville qui a également usurpé des chemins, celui de Guyardmaison au pont Gané, celui de la Bouchetière à Châtenoy, celui de Bouzy au port de la Verrerie. Il est aussi condamné à remettre ces voies en état pour laisser passer voiture et à trois livres d’amende.
Du 24 germinal, an II (13 avril 1794), le citoyen Asselin, manœuvre à la Fontaine, se plaint de Pierre Rousseau, laboureur aux Papillons. Les terres d’Asselin sont enclavées dans celles de Rousseau et Rousseau lui refuse toute possibilité de passage. Il le menace tous les jours, armé soit d’un gaujard (sorte de faucille avec un long manche) en espérant le frapper, soit d’un fusil, car il estime n’avoir aucun droit de passage à céder. Rousseau étant resté sourd aux conseils d’apaisement, la Garde Nationale et les membres du Comité de surveillance réunis (Il a fallu beaucoup de monde !) ont confisqué fusil, fourche de fer, gaujard auprès de la citoyenne Rousseau, seule présente aux Papillons à ce moment (Ouf !).
Du 20 floréal, an II (9 mai 1794), Simon Verger s’est permis de dire en public que les officiers municipaux et l’agent national vendaient les pommes de terre à faux poids. Après vérification, il est confirmé qu’il s’agit d’une médisance.
Du 14 vendémiaire, an III (5 octobre 1794), Ripouteau, laboureur à la Garenne, a refusé une réquisition de 2 quintaux de grain à conduire au marché de Bellegarde et il a répondu au manœuvre Simon Verger qui lui demandait une fournée pour sa subsistance et celle de sa famille qu’il n’en avait même pas pour lui. Mais le citoyen Jacques Beaudin, de Châteauneuf, a été arrêté conduisant une voiture attelée d’un cheval, chargée de 6 mines de méteil (mélange de seigle et de froment) et 8 mines de blé et seigle, la totalité en 7 poches. C’était du grain venant justement de chez Ripouteau, à mettre en farine par Martial Desbois, meunier de Châteauneuf. Le grain a été confisqué et Jacques Beaudin est reparti à vide.
Et ce n’est pas terminé ! Nicolas Roger est délégué chez Durand, meunier à Gabois (meunier habituel de Ripouteau) pour vérifier s’il n’y a pas de grain de ce dernier. La citoyenne Durand confirme qu’il y a du grain Ripouteau au moulin.
Du 16 vendémiaire, an III (7 octobre 1794), 3 livres d’amende et défense de récidiver au citoyen Ripouteau qui cache son grain et refuse les réquisitions.
Du 27 vendémiaire, an III (18 octobre 1794), Laurent Ripouteau doit mener 12 quintaux de grain au marché de Bellegarde pendant 6 marchés (2 quintaux à chaque fois).
Du 26 brumaire, an III (16 novembre 1794), Pierre Rousseau, déjà cité, devant Jean Balle, agent national, a invectivé mille sottises en disant que les membres de la municipalité de Châtenoy étaient tous des « S.C. » (Le secrétaire a censuré), qu’ils n’avaient aucun droit de le désarmé de son fusil et que les réquisitions de grain qu’il subissait étaient injustes.
Du 12 frimaire an III (2 décembre 1794), Rousseau est dénoncé au Comité révolutionnaire du district de Boiscommun comme refusant la réquisition de grains et empêchant la commune de fournir son contingent.
Du 2 pluviose an III (21 janvier 1795), toujours des réquisitions, cette fois-ci liées directement à la guerre et portant sur des chevaux. Trois des douze propriétaires refusent la réquisition d’un de leurs chevaux (Pierre Audouard, Antoine Parisi, et encore Pierre Rousseau !). (Parenthèse : Pierre Rousseau a un caractère ombrageux, c’est le moins qu’on puisse dire et sa fin le confirme : il va mourir dans la maison d’arrêt d’Orléans, en 1807, où il a été incarcéré pour la double inculpation d’incendie volontaire et d’assassinat, commis sur la commune de Châtenoy. Les recherches entreprises dans les différentes archives n’ont pas encore permis de déterminer avec certitude qui fut sa victime…).
La pratique du vol.
Dans la nuit du 23 au 24 juin 1834, Antoine Bontemps, cordeur sur le port au bois, demeurant à la Planche Guérin s’est fait voler un jeton (un essaim d’abeilles appelées encore « mouches ») dans son jardin et on a fait tomber des paniers (éléments de ruches). Le même délit a été commis chez Antoine Gavaret la nuit du 25 au 26 et chez Pierre Asselin laboureur à Cossenet.
Dans la nuit du 12 au 13 septembre 1836, Jean Nicolas Legendre, brigadier forestier à la maison de la Folie, proche le Bourg, s’est fait voler dans son cellier fermant à clé proche de sa maison différents objets, du vin et un lièvre.
Du 6 juin 1842, il a été volé à Louis Combourg, demeurant au Bourg, la nuit précédente, les mouches d’un panier. Le panier a été frappé par terre pour faire tomber les mouches et leurs œuvres (plusieurs galettes de cire et de miel). Le voleur est parti à travers le blé du sieur Moreau mais il n’y a pas d’empreintes de chaussures à cause de la sécheresse.
Le 17 mars 1847, sur le port des Loreaux à Sury-aux-Bois, une péniche qui transportait des sacs de farine pour quatre boulangers de Briare est attaquée et pillée par la foule affamée. Les coupables sont de Sury, mais aussi de Nesploy (50 au moins), de Quiers, de Vitry, de Combreux (9 au moins), de Bellegarde (10), de Nibelle (plus de 30) mais aussi de Châtenoy (1). Les suites juridiques de l’affaire vont longtemps occuper les élus de Sury.
Du 3 juillet 1847, on a volé à Claude Bouchette, 30 ans, garçon laboureur chez sa mère, fermière de la basse-cour du château de la Rivière, deux paniers de mouches à miel. Il ne soupçonne personne.
Du 17 septembre 1848, on a volé à Louis Saunier, 47 ans, bûcheron à Cossenet, un panier de mouches dans son jardin. Le panier appartenait à Pierre Goget d’Auvilliers.
Le 1er juillet 1849, on a volé à Pierre Asselin père, laboureur et propriétaire à Cossenet un panier de mouches, en « ch’ton » (jeton) de l’année. On a emporté les mouches et le panier et a laissé la croûte. Il ne soupçonne personne.
Du 11 décembre 1856, Louis Boulmier, voiturier à Bellegarde, était occupé à arracher de la bruyère, entre 11 heures et midi, sur la route forestière de Vitry à Vieilles-Maisons. On lui a volé une paire de souliers neufs garnis de cordons de cuir dont un était très court, un sac de toile fine ayant deux barres noires, une sur chaque couture, muni de deux cordes avec une troisième très courte, et on a coupé et emporté les cordeaux servant de guide à son cheval.
Dans la nuit du 6 au 7 décembre 1862, un panier de mouches a été volé chez Lejarre, qui ne se souvient plus de la forme du panier car il en a de 2 modèles, un avec la queue appointie et arrondie, l’autre appointi sur trois quart et portant un lien sur le bas du panier pour tenir la solidité.
Du 16 janvier 1871, Thoreau, propriétaire à Châtenoy, a caché un fusil dans les bois de monsieur Thiercelin (domaine de la Rivière). Il n’a plus retrouvé cette arme et il en a conclu qu’elle a été prise. Elle est à crosse anglaise. Le canon est carré à la culasse et un peu usé par le bout. La batterie est décorée de plusieurs gravures : on y voit une levrette. La baguette est une baleine avec tire-bourre. Un accessoire : une poudrière à pompe décorée en cuivre bronzé avec un sac à plomb en peau avec le bout en cuivre. Il y avait aussi une boîte de capsules.
Dans la nuit du 27 au 28 mai 1872, un marchand de jouets de Beaune s’est fait dérober des objets qui ont été retrouvés dans la cour de Morin père : 11 couteaux, 10 porte-monnaie, 3 fusils (des jouets), 6 paires de jarretières et différents autres jouets.
Dans la nuit du 5 au 6 juin 1872, une ruche a été volée chez Bassin, de la ferme du pont Ganet.
Un autre problème : le respect des cultures.
Les dégâts causés par les animaux, directement ou indirectement, sont sanctionnés durement. Le 19 septembre 1847, Louis Séverin Dupuis, garde-champêtre assermenté, au cours de sa tournée, a trouvé 28 moutons appartenant à Jean-Baptiste Morin qui pacageaient dans la prairie des Rondeaux, dans une portion appartenant à la veuve François Berthau, gardés par un petit Morin, âgé de 6 ans. La mère étant venue faire sortir les moutons, le garde-champêtre lui a demandé pourquoi elle ne mettait pas un berger plus âgé dans une prairie ouverte sur les voisins, sans fossé et sans haie. Et il a dressé procès-verbal.
Le 9 juin 1848, il a surpris la femme du sieur Simon Clément qui ramassait de l’herbe dans une pièce de blé du climat de la Noue Nouisse appartenant à Louis Moreau, propriétaire demeurant près du bourg. Louis Moreau le lui avait déjà interdit par deux fois. Nouveau procès-verbal.
Le 22 juin 1848, le même Dupuis a encore trouvé des moutons, ceux du sieur André Moreau, qui faisaient du dégât le long du chemin de Châtenoy à Bouzy, dans une pièce de « blé en seigle » appartenant à Vincent Pelletier, laboureur demeurant au Breuillard. Le garde-champêtre a dû réveiller le petit berger qui dormait. Un procès-verbal a été dressé pour le délit fait par les moutons. Le dégât a été estimé à 2 gerbes de blé.
Le 1er août 1852, c’est devant le maire, Moreau, qu’on se plaint. Laurent Saunier rapporte que son domestique, Pierre Moïse, lui a signalé qu’une bande d’oies était dans une de ses pièces d’avoine et près d’un champ ensemencé en navets, à proximité d’un étang. Le sieur Saunier a été pour s’emparer d’une oie. Aussitôt, le sieur Jamet, d’Aubigny dans le Cher, à qui les oies appartenaient, s’est mis à le frapper à coups de bâton et a lâché un chien après lui.
La version du sieur Jamet est différente : le sieur Saunier a lâché son chien après ses oies et trois ont été étranglées. Puis Saulnier lui a donné un coup de poing sur la figure en lui cassant trois dents dans la bouche… On ignore la suite donnée à l’affaire…
Le 23 juillet 1855, voici un nouveau garde-champêtre en action, Etienne Goget. Il a trouvé une vache en train de brouter la vigne de François Codiasse. Le petit gardien se nomme Baptiste Jahan. Un procès-verbal a été dressé à l’encontre de sa mère.
Le 3 août 1848, à 9 heures du matin, le citoyen Sourceau, vérificateur adjoint des Poids et Mesures, se présente dans la boutique du sieur Sevin Pierre fils, mercier à Châtenoy. Il trouve sur le comptoir, parmi d’autres poids réglementaires, quatre poids anciens : une livre, une demi-livre, 4 onces, 2 onces. La détention de ces poids est en contravention avec l’article 4 de la loi du 4 juillet 1837. Les poids sont saisis, transportés à la mairie et un procès-verbal est dressé.
Quelques autres situations sources de problèmes.
Un courrier au commissaire de police par le maire A. Thiercelin, du 14 janvier 1861 :
Monsieur,
La femme de Simon V… demeurant au bourg de Châtenoy non seulement fait je crois commerce de son immoralité mais encore fait un grand scandale et un tapage nocturne à incommoder tous les voisins ; je vous serais obligé d’y mettre ordre car elle attire chez elle tous les mâles célibataires ou non je crois des environs.
Un autre courrier adressé par l’adjoint au maire, Ménigault.
Châtenoy, le 15 octobre 1862.
Monsieur le Commissaire,
Dans la nuit de lundi dernier, de 9 heures à 11 heures du soir, des bouleaux de 75 à 80 centimètres environ de circonférence ont été placés en travers du chemin vicinal de Lorris dans la traversée du bourg ; une échelle a été dérangée de sa place et jetée par-dessus une haie ; une terrine placée devant la porte de l’instituteur a été brisée ; plus loin, une voiture appartenant à monsieur Rousseau a été prise sous un hangar et roulée à une distance de 60 à 80 mètres de ce hangar, dans un fossé.
Les soupçons ont dû tout naturellement se porter sur des ouvriers terrassiers qui travaillent sur les routes de la forêt à une distance de deux kilomètres du bourg, lesquels ouvriers à cause de la pluie de lundi sont venus se mettre à l’abri chez monsieur Perretan aubergiste à Châtenoy et en sont sortis à 10 heures du soir. Chose remarquable et qui est à leur charge, c’est que tous ces méfaits se trouvent justement sur leur chemin. Ces ouvriers sont sortis de l’auberge dans un état voisin de l’ivresse.
Ils se nomment Godin, Prévost, Brière, Durand, Cadoux et restent à Bouzy.
Afin que de pareils faits ne se renouvellent, je m’empresse de les porter à votre connaissance et vous prie d’exercer des poursuites contre les auteurs des faits…
On apprend par un autre courrier que les ouvriers ont couché chez François Asselin (dans le foin), mais qu’avant de s’endormir, ils se sont « colletés », ont pris des fléaux, se sont mis à frapper dans la grange de manière à réveiller tout le monde de la ferme. On apprend aussi qu’à Bouzy la femme de Durand découvrant les faits reprochés à son mari lui aurait dit : « C’est bien fait, si tu étais venu coucher à la maison, vous n’auriez pas toi et tes camarades fait ces fredaines-là ».
Du 24 février 1872, le sieur Beauvillard, garde-forestier (cantonnier) est en conflit avec les membres de la municipalité qui avaient requis 4 hl d’avoine pour les Prussiens. Il conteste le prix qu’on lui a payé en dédommagement : « C’est une canaillerie, ils ont gratté mes chiffres pour en substituer d’autres, je tiens plus à mon honneur qu’à ma vie, s’ils ne veulent pas, ma vie est à bout, mais j’en tuerai d’autres ». Le lendemain, Goget, garde-champêtre, est envoyé chez Beauvillard pour qu’il s’explique. « Ménigault et Anceau sont des blancs-becs, s’ils ne rétablissent pas mes 20 francs, je leur arrangerai ça avec mon sabre ». Heureusement, madame Beauvillard l’a un peu calmé.
Le 17 octobre 1872, Jean-Baptiste Jahan est agressé verbalement près de sa maison par Jollivet, dit Bravys : « Je ne périrai que par ses mains, il s’avance pour me frapper. Je prends un bout de bois pour me défendre mais il me saisit le bout de bois et me frappe. J’ai pris la fuite, il paraissait décidé à me faire beaucoup de mal ».
Du 30 octobre 1872, Desnoues, cantonnier du canal, a fait remarquer au sieur Clément fils, conduisant une voiture sur le halage auprès du pont Gané que c’était interdit. Il s’est entendu répondre que cela ne le regardait pas, qu’il était un « fainéant » et un « gueulard » et que tôt au tard il se ferait attraper.