Bulletin municipal n° 3 – juillet 1984
Registre des naissances pour l’année 1883, le 2 octobre :
« Commune de Châtenoy, Canton de Châteauneuf, département du Loiret, est comparu Balle Louis, âgé de 37 ans, tisserand, domicilié aux Grands-Champs de cette commune, lequel nous a présenté un enfant de sexe féminin né en son domicile aujourd’hui à huit heures du soir, de lui déclarant et de Fillon Marie, son épouse, âgée de 36 ans, sans profession, domiciliée avec lui, et auquel il a déclaré vouloir donner le prénom de Léontine Angèle. Les-dites déclaration et présentation faites en présence de Pinsard Eugène, instituteur, âgé de 39 ans et de Blondeau Louis, garde-champêtre… »
Léontine Balle est décédée le 6 mai 1984, à la Chapelle Saint Mesmin. Elle avait 100 ans et 7 mois.
Une autre castanéenne, Mélanie Denis, est décédée le 20 avril 1984, à Orléans. Elle était née à Châtenoy 100 ans moins 17 jours plus tôt, le 7 mai 1884 (Elle s’était mariée en 1900, à Orléans, avec Albert Adrien Adam).
*****
« Aujourdhuy dimanche vingt un aoust mil sept cent trente cinq apres midy l’an mil sept cent trente cinq, ont comparu par devant et en l’estude du notaire soussigné Margueritte Senderdine demeurante en la paroisse de Chastenoy aux bois, veuve Estienne Quettier vivant laboureur demeurant au lieu des Beaumercy dite paroisse, laquelle m’a déclaré quelle cest exprès transportée en lestude susdite pour avoir acte de la declaration quelle a a faire, dont la teneur suit, scavoir est quelle declare vollontairement quelle a eu le mal’heur pour contenter sa passion et son envie de porter des calomnies Et dire des sottises atroces contré l’honneur et la réputtation de Me Claude Jarry Licentier en droit civile et canon, Prestre Curé deservant la dite paroisse de Chastenoy ou il demeure, absent, le notaire royal soussigné stipullant et acceptant pour le dit sieur Jarry, dont et desquelles sottises et calomnies par elle (?) et débittée contre lhonneur et la reputtation du dit sieur Jarry. Elle dite veuve Quettier luy en demande excuse, lequelle reconnoy icelluy sieur Jarry pour un très honneste homme et sur la conduicte duquelle elle n’a jamais trouvé à redire bien au contraire quelle na veü et connu que chose de sa part qui puisse ediffier toute la paroisse et non entaché d’aucune movaise quallité, pour quoi par ces présentes elle se detracte de tout ce quelle a eu le maheur de dire en mal contre son honneur et sa reputation puisque non seulement sa reputation si trouve interessée, Mais Dieu y est offensé auquel elle demande pardon, Et pour réparation authentique consent la dite veuve Quettier que ces presentes soient leü publiées et affichées a la porte de leglise dudit Chastenoy, meme reconnois et declare que pour punition de la faute le dit sieur Jarry la condamnée donner un sierge de trois livres pour bruller devant le tres saint sacrement dans l’église dudit Chastenoy cequelle a accepté, Mais remontré en meme temps au dit sieur Jarry sa pauvretté a luy connu, qui suivant son dire eü égard a sa dite pauvretté luy a remis la depense dudit sierge au moyen de quoy il la exortée d’aller demander pardon a dieu qui est offence dans les calomnies et sotises quelle dit avoir profferé dont elle se repend, plus que luy dit sieur Jarry dont et de quoy ladite quettier me requis acte que je luy ay accordé en présence de Rapine garcon Majeur demeurant à Chastenoy avec lequelle elle doit estre mariée de jour en jour, de Thomas Chambon et Anthoine Guillemeau manouvrier demeurant a vieillemaisons de present an ce lieu temoins, ladite veuve quettier, rapine et guillemeau ont dit et declaré ne scavoir singé de ce enquis, »
Chambon Aubert….
Ce document figure aux archives départementales du Loiret, dans la rubrique Notaires, sous la cote 3 E 19566.
Il fait allusion à des « événements » qui se sont déroulés à « Châtenoy-aux-Bois » il y a deux siècles et demi… et qui garderont toujours une part de leur mystère !...
Qu’y apprend-on ?
Une femme se rend chez un notaire pour qu’un document officiel puisse mentionner qu’elle n’a pas su tenir sa langue. (De mauvais esprits pourraient dire que si cette pratique s’était maintenue, les études des notaires seraient encombrées…)
L’étude du notaire, Aubert, semble située à Lorris (1 – Les frais ont été payés dans cette ville comme l’indique une note annexe, 2 – Des témoins habitent Vieilles-Maisons, à mi-chemin entre Châtenoy et Lorris, 3 – Le curé de Châtenoy, le sieur Jarry, n’est pas dans l’étude, il s’est fait représenter par le notaire.)
La femme en question s’appelle Marguerite Senderdine. Elle habite au lieu-dit « Beaux Mercis » et est veuve d’Etienne Quettier qui était laboureur de son vivant. Elle doit se remarier à un
« garçon majeur », Rapine. Marguerite fait « amende honorable » : elle s’accuse d’avoir prononcé des paroles désagréables contre le curé de la paroisse. On peut douter de la sincérité de ses regrets : elle qui a dit « des sottises atroces contre l’honneur et la réputation » du curé, le reconnaît ensuite « pour un très honnête homme ».
Elle va jusqu’à « accepter » que son indignité soit rendue publique par la lecture et l’affichage et admettre le principe d’une sanction financière (le cierge) prononcée par le sieur Jarry. Seule une des personnes concernées, Chambon, sait signer…
Voici un document dont l’intérêt est de montrer la pression considérable qu’exerce le Clergé sur la population au début du XVIIIème siècle. Il est possible que cet incident soit marginal et isolé. Ainsi, Marguerite Senderdine, veuve, semble avoir des relations privilégiées avec un garçon jeune, ce qui doit la mettre en difficulté devant l’opinion publique. En faisant amende honorable, elle préserve une possibilité de remariage (Le Clergé contrôle l’état-civil).
Cet incident est peut-être aussi une trace locale des difficultés que connaît l’Eglise catholique durant cette période (Jansénisme).